Développement durable : Normes internationales
Aujourd’hui, la collection de l’ISO, avec plus de 19 400 normes, met à la disposition des entreprises, des gouvernements et de la société des solutions dans les trois dimensions du développement durable – économique, environnementale et sociétale.
Les normes ISO sont décisives pour le développement durable car elles sont une source importante de savoir-faire technologique, y compris pour les pays en développement et les économies en transition. Elles rendent d’énormes services en aidant les pays à développer leurs économies et à renforcer leurs capacités pour affronter la concurrence sur les marchés mondiaux. Les consommateurs, les pouvoirs publics et les entreprises sur la planète entière tirent parti des travaux de l’ISO.
Dans le monde interconnecté qui est le nôtre, les Normes internationales apportent des solutions harmonisées au niveau international face à des défis d’une telle ampleur au plan mondial qu’aucun pays ne pourrait les relever à lui seul. Ces solutions jouent également un rôle moteur dans l’industrie puisqu’elles évitent à chaque entreprise d’avoir tout à reprendre à zéro. Grâce aux normes, tout le monde peut innover et tout peut inter-opérer.
L’articulation de ces deux sujets était au cœur d’une séance publique très animée tenue en septembre dans le cadre de l’Assemblée générale de l’ISO à San Diego, aux États-Unis.
Cette séance publique a été l’occasion pour les parties prenantes du monde entier – y compris des personnalités du monde des affaires – de bien cerner les enjeux actuels en matière d’innovation et d’économie du développement durable, et d’examiner les actions engagées, les améliorations à réaliser, et l’apport que les normes pourraient offrir dans cette perspective.
Organisée sur un mode très interactif pour favoriser le débat entre les participants, la séance publique a permis une éclosion d’idées, pour pallier les lacunes et saisir les opportunités et les enjeux pour l’élaboration de normes ISO. Une centaine d’idées ont été formulées lors des deux tables rondes qui ont permis d’aborder les attentes en matière de normalisation internationale et de mettre en avant un certain nombre de réalisations exemplaires dans le monde entier.
Torsten Bahke, Directeur du DIN, membre de l’ISO pour l’Allemagne, a prononcé l’exposé liminaire en soulignant l’importance des Normes internationales: «Les défis mondiaux appellent des solutions mondiales et l’ISO, au travers de ses membres nationaux et des organisations en liaison, dispose d’un cadre unique pour réunir les compétences internationales capables de développer ces solutions et de les diffuser avec méthode et efficacité. Grâce aux normes ISO, les solutions novatrices peuvent être transférées aux pays en développement, et leurs avantages peuvent ainsi être mis à profit dans le monde entier.»
Dans le cadre de la première table ronde, Denise Naguib, Vice-présidente, Développement durable et fournisseurs, Marriott International, Inc. (États-Unis), a présenté, dans son exposé, la stratégie de développement durable et la démarche dans laquelle Marriott s’est engagé, ainsi que la mise en place, avec des partenaires du secteur hôtelier, d’une méthodologie commune pour la réduction de l’empreinte carbone.
Elle a insisté sur le fait que l’adoption d’une approche systématique dans l’optique du développement durable a aidé Marriott à parvenir à stimuler l’innovation dans les 3 700 hôtels et propriétés que l’entreprise exploite dans le monde entier.
«Dans notre secteur, nous avons travaillé ensemble pour nous aligner sur la méthodologie que nous pouvons tous utiliser pour progresser dans la démarche et qui nous permet d’établir, avec nos clients, des communications cohérentes sur notre empreinte carbone », a-t-elle observé.
Expliquant à quel point la notion de développement durable, dans le cadre de l’hôtellerie, n’est pas facile à définir – d’où l’importance des normes – elle a déclaré : «La valeur de la démarche qu’offrent les normes est très importante pour mieux communiquer avec nos clients, y compris sur le recours à la norme ISO14001 relative au management environnemental.
L’appui des normes est des plus utiles dans l’industrie hôtelière. En les suivant, nous savons que nous sommes dans la bonne voie et que nous accompagnons le développement durable.»
L’adhésion des entreprises
Dans de nombreux secteurs, les grandes entreprises ont adopté des normes ISO pour différentes objectifs : meilleure assurance qualité, réduction des déchets, impact sur l’environnement et sécurité. A l’instar d’autres normes ISO, ISO50001:2011, Systèmes de management de l’énergie - Exigences et recommandations de mise en œuvre, offre un cadre organisationnel permettant d’atteindre un objectif plus important encore, celui de gérer l’énergie. Les stratégies exposées dans la norme concernent l’établissement de structures de management pour assurer le respect des principes de responsabilité et les résultats que l’on peut obtenir en appliquant l’efficacité énergétique aux opérations et à l’entretien, et en intégrant la question de l’énergie dans des domaines tels que l’industrie, a été bien expliqué dans l’exposé de Chad Gilless, Responsable des services professionnels, Stratégie de gestion de l’énergie, EnerNOC (États-Unis), société de premier plan spécialisée en solutions pour applications et services en management de l’énergie.
Pour avoir participé à l’élaboration d’ISO 50001 depuis que l’initiative en a été lancée en 2008, Chad Gilless a souligné que c’est un outil stratégique et un cadre de travail pour le secteur de l’efficacité énergétique qui pèse plusieurs milliards de dollars. Il a montré ensuite comment les entreprises, les services publics d’énergie, et les gouvernements peuvent mettre la norme à profit pour atteindre leurs objectifs énergétiques.
«L’efficacité énergétique est un atout pour l’entreprise, et des études montrent que les retombées de la mise en œuvre d’ISO50001 au niveau de l’entreprise sont telles que c’est un investissement rentable en moins d’une année», a-t-il fait valoir avant de conclure :
«Avec ISO50001, les atouts de l’efficacité énergétique au niveau des équipements, des données relatives à l’énergie et de l’organisation sont encore plus grands.»
L’intérêt d’ISO 14001:2004, Systèmes de management environnemental – Exigences et lignes directrices pour son utilisation, en particulier pour les PME, a également très bien été développé par l’orateur suivant, Haroldo Mattos de Lemos, Président de l’Instituto Brasil PNUMA (Comité brésilien pour le programme des Nations Unies pour l’environnement – PNUE).
M. Mattos de Lemos a relevé que les travaux de l’ISO favorisent le développement durable, qui a toujours été un concept sous-jacent à l’élaboration des normes. Si l’on considère, par exemple, la famille ISO14000 des normes sur le management environnemental, le recours à ces normes dans l’industrie se traduit en termes d’économie de ressources naturelles, de réduction de la production de résidus et de pollution. Les normes appuient l’innovation dans l’utilisation des ressources naturelles et contribuent à faire en sorte que les biens et services soient acceptables dans le monde entier.
Il a mis l’accent sur la situation du marché pour les PME que l’on pousse de plus en plus à apporter la preuve de l’efficacité de leur système de management environnemental sur leurs processus de production. Un élément supplémentaire de soutien peut améliorer leurs perspectives, a-t-il fait valoir en mettant en avant ISO14005:2010, Systèmes de management environnemental – Lignes directrices pour la mise en application par phases d’un système de management environnemental, incluant l’utilisation d’une évaluation de performance environnementale, qui facilite l’intégration des PME dans la démarche de développement durable.
«De plus en plus, la société attend des entreprises qu’elles fournissent des solutions. A ce titre, elles ont la possibilité de contribuer, aux côtés de la société, à la formulation des priorités en matière de politiques publiques pour le développement durable.»
Les avantages d’un partenariat public-privé ont été approfondis et analysés par Declan Meally, Chef de département, responsable de l’efficacité énergétique non domestique auprès de l’Autorité de l’énergie durable de l’Irlande (SEAI), organisme irlandais pour les programmes et politiques en matière d’énergie durable.
Le partenariat entre la SEAI et l’industrie est un modèle de collaboration entre le gouvernement et les entreprises. Il a joué un rôle clé dans la transformation de l’Irlande, qui est devenue au plan international un chef de file pour les meilleures pratiques, solutions et systèmes de management de l’énergie. La publication d’ISO50001 a été déterminante pour créer un cadre dont les résultats sont probants.
Declan Meally a expliqué que dans les premières années de mise en place des programmes pour l’énergie durable, les interlocuteurs étaient les responsables énergie, mais qu’avec ISO50001 la discussion s’est déplacée de la «chaufferie» au bureau de la direction, en faisant intervenir toute l’équipe et en réunissant les groupes intéressés.
«Nous avons observé d’importants changements au niveau de la productivité grâce à ISO50001», a-t-il fait remarquer avant de citer l’exemple du projet Dundalk 2020 portant sur la création de la première communauté orientée énergie durable en Irlande. L’objectif du projet est d’examiner, de manière structurée, l’interaction de tous les aspects du développement durable et le potentiel de la région à servir d’exemple et de modèle national dans le domaine. Les efforts déployés jusqu’ici sur le projet Dundalk 2020 ont d’ores et déjà permis d’économiser plusieurs millions d’euros sur la facture énergétique, et il est possible de faire encore mieux. L’innovation réside dans l’intégration.
En appui à l’innovation
Les Normes internationales sont un vecteur d’innovation sur le marché dont elles facilitent l’accès à de nouveaux produits et services. Elles renforcent la prise de conscience et la confiance des consommateurs et apportent une contribution positive au monde dans lequel nous vivons, en offrant des solutions et des avantages à tous les secteurs d’activité de l’économie, des sciences à la technologie, du management à la finance ou au commerce.
L’exposé de présentation pour la deuxième table ronde (axée sur l’innovation) de la séance publique a été prononcé par Phil McKinney, Consultant dans le domaine de l’innovation, ancien Vice-président et Directeur de la technologie du Groupe des systèmes personnels de Hewlett-Packard. Il avait choisi pour thème: «La normalisation dans un effort commun d’innovation pour favoriser le développement durable».
Relevant que l’avantage compétitif primordial que toute organisation recherche est celui de gagner du temps, il a insisté sur le fait qu’il importe de raccourcir le cycle du développement dans son ensemble, y compris celui de l’élaboration des normes pour que « le travail que nous faisons aujourd’hui puisse dès maintenant avoir un effet, et non pas dans cinq ou dix ans.
«L’innovation est le moteur de notre économie», a-t-il dit. «Je crois au succès d’un effort commun d’innovation».
Pour Phil McKinney, la réussite des normes suppose la mobilisation d’un plus grand nombre de personnes et la promotion des meilleures idées.
«L’effet d’échelle présente un énorme avantage, a-t-il fait observer, tant au niveau de l’élaboration de nouvelles normes qu’à celui de l’innovation, dont il permet de corriger le décalage et de combler le retard.»
L’importance de l’innovation dans l’application des technologies sans fil au secteur de la santé était le sujet de l’exposé de Rajeeve Rajan, Directeur, Gestion des produits, Qualcomm Life Inc. (États-Unis).
Les progrès dans les technologies sans fil appliquées au secteur de la santé, qui permettent de mieux cerner les maladies et d’en améliorer le traitement, sont en train de révolutionner la prestation des services de santé dans les pays développés et dans les pays en développement.
«Nous sommes devenus autonomes... notre monde est régi par la technologie sans fil. L’accès à un téléphone cellulaire est possible à de plus nombreuses personnes que ne l’est l’accès à l’eau potable, à l’électricité ou à une brosse à dents.»
Or, et c’est bien là que se situe l’enjeu, dans le secteur des technologies médicales qui est très fragmenté, hautement concurrentiel et particulièrement réglementé, il y a des éléments à normaliser, la question de l’interopérabilité étant la plus immédiate.
«La fragmentation et la connectivité sont incompatibles», a-t-il souligné, en expliquant que, dans le domaine de la santé, les appareils et les systèmes ont besoin d’interopérabilité pour être opérants, et les Normes internationales peuvent fournir les solutions indispensables pour que ces technologies puissent s’articuler et fonctionner ensemble.
Quant aux orientations à long terme, «les normes peuvent aussi autoriser la différenciation. Elles devraient régir les couches inférieures du système de manière à ce que les producteurs et les fournisseurs puissent différencier leurs produits au niveau des couches supérieures et des couches d’application.»
Le rôle de facilitation des Normes internationales a été mis en avant par Jacques Lair, Président du comité technique de l’ISO récemment créé, l’ISO/TC 268, Aménagement durable.
Le domaine des travaux de ce TC portera sur une série de Normes internationales visant à encourager le développement et la mise en œuvre d’approches globales, transversales et localisées du développement durable à l’échelle territoriale.
«Le but est en ligne avec les objectifs généraux du développement durable », a déclaré Jacques Lair, «ces recommandations amélioreront l’usage qui est fait des ressources locales, donneront accès aux meilleures technologies disponibles et réduiront l’impact environnemental. Pour y parvenir, les solutions innovantes doivent être adaptables et procéder par pallier successifs.»
M. Lair a terminé son exposé en encourageant la participation au sein de l’ISO/TC 268. Le succès dépend de l’implication d’un grand nombre d’experts de différents pays, et là aussi l’union fait la force », a-t-il fait valoir en conclusion.
Patrick Macleamy, Directeur général de HOK Architects, un Bureau de conception, prestataire de services à l’échelon mondial, a présenté un exemple de travail de réflexion novateur applicable au secteur du bâtiment.
La consommation d’énergie des bâtiments représente près de 40 % de l’utilisation énergétique mondiale et 40 % des déchets solides. Ces exigences énergétiques peuvent être réduites de multiples façons et les économies d’énergie réalisables dans le secteur de la construction en misant sur l’efficacité énergétique aideraient à diminuer notablement la consommation d’énergie mondiale.
La démarche buildingSMART est une approche innovante applicable non seulement au niveau de la conception des bâtiments, mais aussi à celui de leur construction et de toute la durée de leur cycle de vie.
Dans l’industrie du bâtiment, le retour sur investissement peut être élevé si l’on applique la démarche à toutes les phases successives – conception, construction et utilisation – du bâtiment. M. MacLeamy a indiqué que pour chaque dollar/euro/livre investi dans la conception d’un bâtiment, il en est investi vingt fois plus dans sa construction. La plupart des propriétaires qui se font construire des immeubles pensent que le coût du bâtiment s’arrête là. Or, le coût de fonctionnement réel d’un bâtiment est trois fois plus élevé que son coût de conception.
La démarche buildingSMART compte trois volets :
- Le modèle BIM (Building information model) : Conception (USD 1)
- Le modèle BAM (Building manufacturing assembly) : (USD 20)
- Le modèle BOOM (Building operation optimization model) : (USD 60).
Ce troisième volet est celui qui peut rapporter le plus ! On peut ainsi économiser au minimum 10 %, voire 30 % de la consommation d’énergie sur toute la durée de vie du bâtiment. Notre travail consiste à mettre au point des solutions interopérables avec lesquelles n’importe quel prestataire ingénieux pourra interagir avec tous les autres, en améliorant ainsi l’environnement bâti. Telle est la promesse de buildingSMART.
« Nous pensons que les résultats que nous avons pu dégager de nos travaux doivent être intégrés dans des normes ISO », a fait observer Patrick MacLeamy, avant de conclure que l’industrie de la construction n’est pas locale, mais mondiale. Les grandes entreprises de construction sont partout. Le travail sur le fonctionnement des bâtiments est une profession à part entière, c’est toute une réflexion à mener en amont et non pas après coup.
Perspectives pour l’avenir
S’adressant aux participants à l’issue de cette journée de réflexion, le Secrétaire général de l’ISO, Rob Steele, a une nouvelle fois souligné l’importance de cette séance publique dans la conjoncture économique actuelle. L’innovation, le développement durable et les normes relèvent du bon sens économique. « Il y aura toujours besoin de normes, c’est évident ! Ce qui l’est moins, c’est de trouver les meilleures solutions », a déclaré Rob Steele.
La séance publique, avec ses débats et ses séances de réflexion, a permis de dégager une multitude d’idées quant au rôle de l’ISO en matière de développement durable et d’innovation.
Plus d’une centaine d’idées ont été exprimées. Toutes ont été regroupées sous quelques thématiques :
Le succès est affaire de collaboration (entreprises, organismes de réglementation, organisations élaboratrices de normes (SDO), universités)
La communication est un élément clé – l’activité de l’ISO est-elle comprise ?
L’innovation s’accélère
Les normes ont un effet de levier sur la R & D et l’innovation
Le marché appelle des réponses rapides…. après, il est trop tard !
Dans de nombreux exposés et débats, sinon dans la plupart, les intervenants ont convenu que les Normes internationales apportent de multiples avantages à tous les secteurs de l’économie, qu’il s’agisse du secteur de l’accueil, des villes intelligentes ou de la construction. Il y a matière et urgence à établir davantage de normes pour tous les secteurs de l’industrie afin de les aider à innover et à améliorer toujours et encore leurs résultats.
Comme l’a signalé le Secrétaire général de l’ISO, «toutes les suggestions seront examinées. Nous allons les regrouper, les évaluer et, si possible, les intégrer dans le Plan de mise en œuvre. Les idées d’ordre plus stratégique et de plus grande portée devront être communiquées au Conseil pour suite à donner.»
L’ensemble des exposés des différentes tables rondes est maintenant disponible. Toutes les idées et tous les commentaires peuvent être consultés sur www.iso.org/ga2012pres. Les informations concernant la suite donnée seront également accessibles sur cette page Web.
Source : https://www.iso.org/fr/home.html